Suivre le troupeau

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Quand j'habitais la région parisienne, il me fallait pratiquement 2h de moyens de transport pour arriver à la faculté. Au début, je faisais attention parce que j'avais peur de rater la station, j'étais intriguée par ce réseau emmêlé (pour une jeune marocaine dont les moyens de transport avaient encore beaucoup de secrets pour elle). Mais l'habitude a fini par gagner le terrain et je m'y suis sentie à l'aise comme un poisson dans l'eau, oups comme un rat dans les égouts.
Des visages ternes, des expressions aux abonnées absentes, quand je disais « bonjour » elle avait un écho que dans ma tête. Les jours ont passé, les semaines aussi, et je me conformais aux usagers des moyens de transport parisien. Jusqu'au point où pas mal de fois, je descendais dans une station qui n'était pas la mienne, je suivais la personne dans une direction qui était la sienne. Pire en courant.
Un jour, je me suis rendu compte de l'inévitable. J'ai aperçu l'incontournable. Je suis devenue un mouton. Nous ressemblons à un troupeau de moutons (quelque part l'idée de faire partie d'un troupeau me réconfortait, je ne suis pas toute seule), mais je devais me comporter comme eux. J'ai fait des recherches sur le mouton, eh oui c'était super important de savoir à quel rang j'appartiens. J'ai trouvé les 7 commandements du mouton selon Nietzche :
1. Conforme-toi aux usages de ton entourage !
2. Sois toujours docile et doux comme un agneau !
3. Laisse-toi tondre puisqu'on te dit que c'est pour le bien commun !
4. Hurle avec les loups pour ne pas te faire dévorer !
5. Broute toujours l'herbe que le berger te dit de consommer !
6. Suis l'avis du plus grand nombre, c'est la loi démocratique  !
7. Ne fais surtout pas de vague, mais rester dans la vague sans t'affirmer !
Intéressant, non ? Le seul problème c'est que je n'aime pas la conformité qui tue toute forme de créativité. Je me suis félicitée de la prise de conscience. Mais il fallait se détacher de ce troupeau tellement mignon, tellement doux, tellement docile. Et j'ai choisi de devenir une chèvre. Je garde la douceur mais je troque la docilité avec l'insoumission.